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Le Chemin de Croix: ces paroles inoubliables du cardinal J. Ratzinger

Carême 2005, le pape Jean Paul II, fatigué et malade renonce à présider le traditionnel Chemin de Croix au Colisée de Rome. Il confie la tâche au cardinal Joseph Ratzinger lequel prépare même les méditations dont certaines paroles sont restées mémorables. Dans celles-ci, il dresse un bilan sans complaisance de l’état de l’Église. S’agissant de la signification du Chemin de Croix, l’alors préfet de la Congrégation de la Doctrine de la foi refuse qu’on le réduise à « une compréhension purement sentimentale ». Car dit-il, « le chemin de Croix est un chemin qui conduit à la communion spirituelle profonde avec Jésus ».  Le Chemin de croix, insiste-t-il, est « le chemin du reniement de soi, c’est-à-dire le chemin de l’amour véritable ».  Voici un extrait des paroles introductives de ces méditations qui resteront à jamais gravées dans la mémoire de la spiritualité chrétienne (Colisée, Chemin de croix 2005).

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« La prière du Chemin de Croix peut se comprendre comme un chemin qui conduit à la communion spirituelle profonde avec Jésus, sans laquelle la communion sacramentelle resterait vide. Le Chemin de croix apparaît comme un chemin « mystagogique ». À cette vision s’oppose une compréhension purement sentimentale du Chemin de croix, risque dont le Seigneur avertit les femmes de Jérusalem qui pleurent sur lui (cf. huitième station). Le simple sentiment ne suffit pas ; le Chemin de croix doit être une école de foi, de la foi qui, de par sa nature, « agit par la charité » (Ga 5,6). Cependant, cela ne signifie pas que le sentiment doit être exclu. Pour les Pères, le premier défaut des païens est leur manque de coeur ; aussi reprennent-ils la vision d’Ézéchiel, qui communique au peuple d’Israël la promesse que Dieu fait d’enlever de leur poitrine le coeur de pierre et de leur donner un coeur de chair (cf. Ez 11, 19). Le Chemin de croix nous montre un Dieu qui partage lui-même les souffrances des hommes, dont l’amour ne demeure pas impassible et distant, un Dieu qui descend parmi nous, jusqu’à la mort sur la croix (cf. Ph 2,8). Le Dieu qui partage nos souffrances, le Dieu fait homme pour porter notre croix, veut transformer notre coeur de pierre et nous appeler à partager les souffrances d’autrui. Il veut nous donner un « coeur de chair » qui ne reste pas impassible devant les souffrances d’autrui. Il se laisse au contraire toucher et nous conduit à l’amour qui guérit et qui vient en aide. Cela nous renvoie aux paroles de Jésus sur le grain de blé par lesquelles il transforme la formule fondamentale de l’existence chrétienne : « Celui qui aime sa vie la perd ; celui qui s’en détache en ce monde la garde pour la vie éternelle » (Jn 12,25 ; cf. Mt 16,25 ; Mc 8,35 ; Lc 9,24 ; 17, 33 : « Qui cherchera à conserver sa vie la perdra. Et qui la perdra la sauvegardera »). Cela nous explique aussi ce que signifie la phrase qui précède ces paroles centrales de son message dans les Évangiles synoptiques : « Si quelqu’un veut marcher derrière moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix, et qu’il me suive » (Mt 16,24). Par ces mots, il offre lui-même l’interprétation du « Chemin de croix », il nous enseigne comment nous devons le prier et le suivre : le Chemin de croix est le chemin du reniement de soi, c’est-à-dire le chemin de l’amour véritable. Sur ce chemin il nous a précédés ; c’est ce chemin que veut nous enseigner la prière du Chemin de croix. Et cela nous ramène encore au grain de blé qui doit mourir, à l’Eucharistie, dans laquelle se rend continuellement présent au milieu de nous le fruit de la mort et de la résurrection de Jésus. En elle, il marche avec nous, comme autrefois avec les disciples d’Emmaüs, se faisant toujours de nouveau notre contemporain ».