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Le chemin de liberté et de vie pour les pauvres

Hier, pas plus qu’aujourd’hui, pendant le moment de crises socio-économiques qui ravagent le monde, les « prophètes » et les « messies » fusent de partout. A chaque fois, ils se disent investis d’un pouvoir extraordinaire qui leur vient d’ailleurs et au nom de celui-ci, ils prétendent avoir la solution pour chaque problème. Cependant, il n’est pas rare que la thérapie qu’ils proposent agrave la situation au lieu de l’apaiser.

La liturgie de ce dimanche nous parle d’un Messie, pas comme les autres. Il est pauvre, doux et pacifique (Cf la première lecture). Son pouvoir tranche avec celui des puissants de ce monde. Les pauvres et les humbles trouvent en lui la raison de continuer à vivre. Ce Messianianisme de Jésus pousse ceux-là qui croient en Lui de ne plus voir le monde actuel avec ses avatars multiples comme une fatalité car, grâce à l’Esprit Saint, nous pouvons redonner vie à notre humanité évanescente.

  1. L’Espérance des sans espoir

La première lecture ( Za 9,9-10 ), écrite vers la fin de l’empire perse (331 av Jc) jusqu’à la mort d’Alexandre le Grand (323 av Jc), nous parle de la venue du Messie pauvre. Dans un contexte de domination, de division et de conflit où l’impie semble gagner et le croyant semble échouer, le peuple espère en un Dieu libérateur qui viendrait finir la guerre, réunir le pays, conquérir la souveraineté de la nation et reconstruire tout ce qui a été abimé.

Contre toute attente, Dieu envoie un prophète (Zacharie) pour encourager le peuple à se mettre debout pour marcher sur ses propres pieds. On comprend pourquoi le texte d’aujourd’hui invite Jérusalem à « pousser des cris de joie » car son roi qui vient est « juste et victorieux ». Désormais le peuple ne sera plus piétiné, opprimé et humilié car le roi qui vient est juste et efficace quoiqu’humble. Sa justice consistera à défendre les droits des pauvres et sa victoire consiste à mener le bon combat, celui de la justice. Il est humble parce qu’il ne se sert pas des moyens des puissants (le cheval propre aux dominateurs) mais il a un ânon (propre aux petits et aux humbles). Ses intentions sont en faveur de la paix. Dieu vient monté sur le petit d’une ânesse qui fut un moyen de transport propre aux juges (Juges 5, 10 ; 10,4), il est ainsi un leader politico-charismatique qui va démanteler le pouvoir absolu du dominateur, un pouvoir d’injustice, d’avidité et de répression. Il est le modèle du pouvoir parce que son pouvoir est un pouvoir dépourvu de force.

Ce Messie apparemment désarmé vient détruire les instruments de la mort pour instaurer un nouveau monde fondé sur un projet de paix perpétuelle. Le prophète Zacharie veut susciter l’espérance chez tous ceux qui souffrent du poids de l’oppression dans le temps présent et passé. Pour tous ceux qui souffrent, il y a une espérance qui mène à la vie : c’est le Messie.

  1. La libération des pauvres

D’après l’Evangile selon saint Matthieu, Jésus est le Maître qui est venu réaliser la justice (Mt 3,15) concrétisée par la solidarité envers ceux qui souffrent. L’Evangile de Matthieu, à part le prologue (chap.1-2) et la scène de la mort et résurrection de Jésus (26, 3 - 28, 20) est organisé en cinq discours. Le texte de ce dimanche appartient au troisième discours (chap. 11-12). Le thème de cette partie est celui d’opposition auquel Jésus fait face de la part des scribes et pharisiens. Pour dire cette opposition Jésus parle des « sages » et « savants » d’une part et les « doux » et les « humbles » d’autres part. Les sages et les savants sont ceux qui mènent leur vie indépendamment du Christ. Ils s’imaginent construire leur vie, ils sont tellement sûrs d’eux-mêmes, de leur intelligence et de leur savoir-faire qu’ils n’ont pas besoin de Dieu dans leur vie. Ils sont autosuffisants et imbus d’eux-mêmes. Par orgueil, ils sont bornés et incapables de voir en Jésus le Messie, le Sauveur de l’humanité tout entière. En revanche, les humbles et les petits sont tous ceux-là qui mettent leur foi en Dieu. Dans la joie comme dans la tristesse, dans l’abondance et dans le dénuement, ils se confient toujours en Dieu. Alors que les « sages » et « savants » par amour des honneurs de ce monde rejettent tout ce que Jésus dit et fait, les humbles et les petits, par amour de Dieu acceptent d’accueillir ce que dit et fait Jésus.

Jésus s’adresse à tous ceux qui peinent sous le poids de leurs fardeaux pour qu’ils les consolent. La vie difficile pèse sur nos épaules. Le chômage et la précarité généralisés sont autant des fardeaux que nous devons porter vers Jésus pour qu’il nous console. Le poids de nos péchés, nos vices et nos manquements, etc. tout cela le Seigneur veut le prendre sur soi pour nous procurer le repos. Parfois le fardeau est imposé par les structures déshumanisantes, parfois il est le résultat du choix que nous faisons librement. Dans tous les cas, le Seigneur veut nous libérer.

Alors que l’élite représentée par les scribes et les pharisiens considérait le reste du peuple comme maudit en ce sens qu’il était ignorant et ne pratiquait pas scrupuleusement la loi, la pratique de Jésus montre le contraire. Dieu dans la personne du Fils a pris chair en choisissant la classe des pauvres. Il ne s’agit pas de dire que Jésus est moins exigeant envers les pauvres, il n’est pas venu annuler la loi mais il est venu la compléter (5, 17). La différence se trouve dans sa manière de faire. Il ouvre la porte de la miséricorde et révèle la justice de Dieu aux pauvres et aux petits. C’est seulement après, qu’il les invite à vivre dans la vraie justice qui vient de Dieu.