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XIème Dimanche du Temps Ordinaire

Commençons cette réflexion par une petite histoire. Un petit enfant, fatigué d’être toujours celui que toute la famille envoi partout pour faire de petites commissions, a décidé, un jour, d’écrire à sa maman, l’une de ceux qui lui demandaient souvent de petits services. Voilà ce que le petit a écrit à sa mère.

« Maman, bonsoir. J’écris ces lignes pour te demander la récompense pour toutes les faveurs que tu m’avais demandées. En voilà la liste :

  • Aller au marché pour acheter du sucre = 200 F
  • Récupérer tes commandes d’habit chez le tailleur = 300 F
  • Aller chez la tante Claire toujours pour tes affaires = 250 F
  • Ramasser les affaires du grand-frère à l’agence de bus = 500 F
  • Aller chez les prêtres pour déposer le repas pour eux = 250 F

Au total tu me dois 1.500 F. Merci de me rembourser cet argent au plus vite possible.

Ton fils, François ».

La maman, ayant reçu cette petite lettre, a également écrit une autre lettre pour y répondre. Voilà ce que la mère a composé comme lettre de réponse.

« Mon fils, bonsoir. J’ai bien reçu ta lettre, demandant les frais de tous les services que tu m’as rendus. Je voudrais aussi me faire rembourser pour tous les services que je t’avais rendus. En voilà la liste.

  • Pour t’avoir porté dans mes entrailles pendant 9 mois et 10 jours = gratuit
  • Pour toutes les nuits blanches que j’ai passées ton chevet quand tu étais malades = gratuit
  • Pour les tristesses que j’avais endurées lorsque tu n’étais pas pris dans l’équipe de football de ton école que tu aimais tant = gratuit
  • Pour toutes les bêtises que tu as faites dont tu demandais souvent le pardon = gratuit
  • Pour toutes les larmes que j’ai aussi versées lorsque tu pleurais parce qu’on se moquait de toi à l’école à cause de l’absence continuelle de ton papa = gratuit

Eh bien, au total tu ne me dois RIEN. TOUT EST GRATUIT.

Ta maman, Constance ».

Nous pouvons rire en lisant cette correspondance entre ce petit enfant et sa mère. Mais, je pense que, ce que la maman du petit a fait, c’est exactement ce que Dieu a fait pour nous. Il nous a tout donné. Et cela est gratuit. Il nous choisit comme son peuple. Même si ce choix, nous ne l’avons pas mérité ; et encore, cela est pour rien. Gratuit. Le choix de Dieu est insondable. Pourquoi a-t-il choisi Israël comme son domaine particulier, comme son peuple avec qui Il a fait l’alliance ? Qu’avait-il, ce peuple, de particulier jusqu’à ce que Dieu l’ait chéri de telle manière comme nous dit le livre de Deutéronome dans la première lecture de ce dimanche ? La réponse est toujours la même : pour rien. Gratis. 100 % don. Oui, frères et sœurs, Dieu nous choisit, nous aime, veut notre bien et notre salut pour rien, par pur amour. « Vous avez vu comment ce que j’ai fait à l’Égypte, comment je vous ai portés comme sur les ailes d’un aigle et vous ai amenés jusqu’à moi ». Malheureusement, qui peut encore croire à cela aujourd’hui ? L’amour gratuit pour rien ? Qui peut encore s’en tenir à ce type d’amour ? Voilà le grand défi pour nous aujourd’hui, les croyants. Sommes-nous encore capables de témoigner de cette bonté, de cet amour infini de Dieu pour nous ? Ou, sommes-nous indifférents, totalement insensibles, à cette dimension invisible de notre vie de foi jusqu’à ce que rien ne soit changé dans notre vie ? Nous restons imperméables à cet amour de Dieu. Nous vivons sans aucune référence à ce geste incommensurable de la part de Dieu, Son geste amoureux en venant vers nous, en nous tendant Sa main pour faire alliance avec nous. « Voyant les foules, Jésus fut saisi de compassion envers elle parce qu’elles étaient désemparées et abattues comme des brebis sans berger ….. Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux et expulsez les démons. Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement ».

Oui, en réfléchissant sur la parole de Dieu et en priant avec elle en ce XIème Dimanche du temps ordinaire, je ne peux qu’être émerveillé par cette manifestation de l’amour infini de Dieu à notre égard. Tout d’abord cet amour s’est manifesté à Israël, le peuple de la première Alliance et puis à nous aujourd’hui. Tout cela se réalise à travers et en la personne de Jésus de Nazareth. Grâce à Lui, nous sommes devenus l’objet et le sujet de cette amour préférentiel. Oui, j’ai dit bien que nous sommes devenus l’objet et le sujet de cet amour gratuit de Dieu. L’objet, c’est parce que nous recevons cet amour, cette prédilection divine. Cependant cet amour ne fait pas en sorte que nous devenions dépendants, incapables, obnubilés. C’est justement ce qui est extraordinaire de l’amour de Dieu ou du vrai amour. Ce n’est pas pour rien d’ailleurs si l’amour est utilisé pour définir Dieu (Cf. 1 Jn 4, 7-19). Oui, l’amour de Dieu nous transforme en un sujet aimant. L’aimé est devenu aimant. La même logique s’applique pour les cas des personnes converties à Dieu. Ce sont des pécheurs pardonnés. Rien d’étonnant dans la parole de Jésus adressée à Zachée « Aujourd’hui le salut est arrivé dans cette maison, car lui aussi est un fils d’Abraham » (Luc 19, 9). Avec cette rencontre, Zachée est transformé. Il n’est plus seulement l’objet de l’amour de Dieu à travers Jésus ; il est devenu par la suite ce sujet qui aime et fait miséricorde.

Je pense qu’en ce dernier point que se trouve le vrai défi, voire même le vrai problème de tous les croyants de n’importe quelle religion. C’est que ce qu’on croit n’est forcement pas ce qu’on fait. Ce clivage énorme entre croire et faire devient vraiment notre plus gros défi. Il n’est pas étonnant que Mahatma Gandhi, le père de la nation Indienne, aurait dit un jour « Sans doute serais-je chrétien, si les chrétiens l’étaient vingt-quatre heures par jour ». Demandons donc aujourd’hui la grâce et la force de Dieu afin que nous devenions ceux et celle qui mettons en pratique notre foi en Jésus-Christ. Suivons le conseil de saint Jacques : « Mettez la Parole en pratique, ne vous contentez pas de l’écouter ; ce serait vous faire illusion. Car si quelqu’un écoute la Parole sans la mettre en pratique, il est comparable à un homme qui observe dans un miroir son visage tel qu’il est et qui, aussitôt après, s’en va en oubliant comment il était » (Jc 1, 22-24).

Beaucoup de personnes disent que « Ô, qu’est-ce que c’est classique d’affirmer et de confirmer que Dieu est bon et son amour est pour toujours. Et, pourtant dans la vie, rien ne va. Trop de souffrances autour de nous, par exemple ce qui s’est passé dans la mer Égée dernièrement avec plus 600 personnes péries noyées. Oui, Dieu est amour, alors ça change quoi ? ». Je pense qu’un de notre devoir de croyant est justement de ne jamais oublier d’annoncer cette vérité, celle qui nous fait croire que Dieu est amour et miséricorde. Et, Il veut notre bien. Il veut tout le monde soit sauvé (Cf. 1 Tm 2, 4). Puisqu’oublier cet aspect de la foi : la reconnaissance de la bonté et de l’amour de Dieu, nous conduira, je pense bien, à la ruine de notre vie humaine. N’est-ce pas, le regretté mémoire Cardinal Carlo Maria Martini a conseillé de faire d’abord la confessio laudis avant de faire la confessio vitae et la confessio fidei durant le sacrement de la réconciliation ? (Cf. C.M. Martini, La via di Timoteo, Casale Monferratto : Piemme, 1995). Ce qu’il a donné comme conseil souligne justement cette importance de reconnaitre les bienfaits de Dieu dans notre vie avant tout. Sans cela, le pessimisme, le désarroi, le désespoir sont prêts pour nous tomber dessus afin d’anéantir le peu de foi que nous avons. Avec le Psaume 99 (100) dont les extraits sont chantés ou proclamés après la première lecture aujourd’hui, disons ensemble : « Oui, le Seigneur est bon, éternel est Son amour, Sa fidélité demeure d’âge en âge ».

Pour finir, entonnons ce refrain « Ô Seigneur comment reconnaître les bienfaits dont Tu m’as comblé ; chaque jour, je célébrerai tes grandeurs, alléluia ! » …… Bon dimanche !